Corse : Des entreprises sanctionnées pour avoir fait grimper les prix des carburants
Des sanctions contre des entreprises pour gonflement des prix en Corse
L’Autorité de la concurrence a récemment sanctionné plusieurs entreprises en Corse pour avoir participé à une entente ayant faussé le marché des carburants. Cette pratique a permis d’augmenter artificiellement les coûts pour les concurrents et, en fin de compte, fait grimper les prix à la pompe.
Une amende record pour une pratique anticoncurrentielle
Le 17 novembre 2025, l’Autorité a infligé une amende de 187,5 millions d’euros à TotalEnergies Marketing France, deux filiales de Rubis et EG Retail. La cause : une entente sur l’accès aux dépôts pétroliers de l’île, qui gèrent les seuls sites de stockage locaux.
Les investigations ont révélé qu’entre 2016 et 2022, les actionnaires de la société Dépôts Pétroliers de la Corse (DPLC) — notamment Total, Rubis et EG — avaient signé un accord écrit. Cet accord leur donnait un droit de passage prioritaire dans ces dépôts mutualisés, empêchant ainsi d’autres opérateurs comme Vito ou Ferrandi d’y accéder facilement. Ces derniers devaient alors acheter leur carburant directement aux grands, avec des marges plus importantes et des coûts de stockage en hausse. Cela a conduit à des prix d’achat plus élevés, qui se répercutent sur les prix à la pompe, selon l’Autorité.
Un marché très concentré et peu concurrentiel
Le marché insulaire est dominé par trois acteurs : Total, Rubis (avec ses stations Vito) et Esso via Ferrandi. Il n’y a pas de grandes surfaces comme Leclerc ou Intermarché qui pourraient faire jouer la concurrence comme sur le continent. La situation crée un oligopole où l’accord sur les dépôts consolidait le verrou. En mars 2025, l’écart de prix moyen avec le continent était d’environ 13,4 centimes par litre, pouvant atteindre 20 centimes sur le gazole, malgré une TVA réduite à 13 %.
Une enquête longue et des réactions variées
Les investigations ont débuté en décembre 2021. La plainte de la société Ferrandi en septembre 2022 a accéléré la procédure. Après analyse des contrats, l’Autorité a conclu à l’existence d’une entente illicite. Au fil des années, le contrôle de DPLC est passé de grandes compagnies comme Shell, BP et Esso à Rubis, suite à des cessions réalisées entre 2010 et 2017. L’accord sur les droits de passage est resté en place, au bénéfice des actionnaires restants.
Des amendes importantes et des contestations
Les sanctions sont lourdes. TotalEnergies doit payer 115,8 millions d’euros pour sa filiale Marketing France. Rubis Energie et Rubis Terminal doivent respectivement verser 64,2 millions et 430 000 euros, tandis qu’EG Retail doit s’acquitter de 7 millions. Total a déjà annoncé son intention de faire appel, tout comme Rubis et EG Retail. Du côté des associations de consommateurs et des élus, la satisfaction est palpable, car cette décision pourrait contribuer à faire baisser les prix.
Une situation toujours tendue pour les automobilistes corses
Malgré la TVA réduite, le prix du gazole dépasse souvent 1,90 euro par litre, et celui de l’essence SP95 tourne autour de 2 euros. Des propositions de loi, notamment celle du député Colombani, évoquent une régulation des prix, voire leur fixation. La décision de l’Autorité pourrait pousser à une ouverture plus large des dépôts, ce qui soulage les petits exploitants, contraints de payer des frais élevés pour stocker leur carburant ou d’acheter directement aux grands. Certains professionnels espèrent un changement durable, mais rien n’est garanti, surtout avec la hausse des prix liée aux tensions géopolitiques.
